Exploiter l’armoire à pharmacie de mère Nature
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Le genre d’aliments que nous mangeons peut être la clé de la longévité et de la santé à long terme. Pour les agriculteurs, les conséquences sont énormes.
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Comme le disaient nos mamans, les légumes sont vraiment bons pour nous. Mais peut-être commençons-nous tout juste à le comprendre.
Plus les scientifiques percent les mystères biochimiques enfouis dans presque chacune des catégories d’aliments que nous consommons – légumes, fruits, œufs, produits laitiers, viande et céréales – plus les consommateurs deviennent conscients de ce qu’on appelle les aliments fonctionnels et les nutraceutiques et de leur capacité de réduire les maladies et de prolonger la vie.
Partout les gros titres soulignent les toutes dernières découvertes de chercheurs qui tentent d’exploiter l’armoire à pharmacie de mère Nature. Nous avions l’habitude de penser aux aliments en termes de protéines, de vitamines et de minéraux ; aujourd’hui, un régime équilibré comprend aussi des béta-glucanes, des lignanes et des flavonoïdes. (Pour connaître leur rôle dans les régimes santé, voir le tableau qui accompagne le présent article.)
Les consommateurs semblent tout à fait prêts à payer pour des aliments qui, selon eux, contiennent plus que la valeur nutritionnelle traditionnelle. À l’échelle mondiale, les ventes d’aliments fonctionnels et de nutraceutiques (y compris les produits à base d’herbes et les suppléments diététiques) représenteraient entre 70 et 75 milliards de dollars par année. La valeur estimative actuelle du marché américain des aliments fonctionnels est de 26 milliards de dollars, contre un milliard de dollars pour le marché canadien.
Comme la biotechnologie rend presque tout possible, les cultures de demain pourraient bien être composées en partie de produits alimentaires et en partie de médicaments, quelques acres de culture pouvant valoir beaucoup plus que des centaines d’acres aujourd’hui.
Longévité et santé à long terme
« Les aliments fonctionnels sont des aliments conventionnels qui procurent certains bienfaits physiologiques additionnels, » explique
Mme Kelley Fitzpatrick, présidente du Saskatchewan Nutraceutical Network, une association corporative qui regroupe une centaine d’organismes canadiens et étrangers engagés dans l’élaboration, la transformation et la commercialisation d’aliments fonctionnels et de nutraceutiques.
Les oléagineux comme le canola et le lin sont de bons exemples d’aliments fonctionnels, indique-t-elle. Selon les recherches, les niveaux élevés du canola en acides gras essentiels et la forte teneur du lin en acides gras oméga 3 peuvent réduire le risque de maladie cardiovasculaire.
Les nutraceutiques sont typiquement des produits qui ont été isolés et parfois concentrés et qui sont vendus sous forme de pilules ou de capsules, ajoute-t-elle. Les nutraceutiques comprennent de nombreux suppléments diététiques et à base d’herbes.
Parmi les tendances qui favorisent la croissance des aliments fonctionnels et des nutraceutiques, il y a les préoccupations économiques à l’égard des coûts des soins de santé, la validation scientifique du rôle des aliments fonctionnels ainsi que les données démographiques. « Toutes les sept secondes aux États-Unis, un baby-boomer atteint l’âge de 50 ans, » poursuit Mme Fitzpatrick. « Ce sont pour la plupart des personnes instruites qui bénéficient d’un revenu disponible qu’elles peuvent consacrer aux soins de santé. Elles sont préoccupées tant par la santé à long terme que par la longévité. »
Le lait est bon pour vous !
Même le lait se classe parmi les aliments fonctionnels, selon Mme Sylvie Gauthier, biochimiste à l’Université Laval de Québec. D’après ses recherches, des composants des protéines de lait modifié pourraient aider à prévenir la tension artérielle et stimuler les systèmes immunitaires afin de combattre la maladie.
Ses travaux ont par ailleurs donné lieu à des débouchés comme le lait maternisé pour les bébés allergiques aux protéines du lait, les boissons enrichies de protéines, les aliments destinés aux athlètes de haut niveau et la mayonnaise sans œufs pour les personnes qui surveillent leur taux de cholestérol.
« Les protéines du lait sont très bonnes en termes de valeur nutritionnelle, » explique-t-elle.
« Si on les modifie, elles possèdent aussi d’autres propriétés uniques. »
Ses recherches, tout comme celles de M. Joe Mazza, ne sont que la pointe de l’iceberg que les scientifiques continuent d’explorer. Chercheur principal au centre de recherche d’Agriculture et Agroalimentaire Canada à Summerland en Colombie-Britannique, M. Mazza étudie depuis quinze ans le rôle des anthocyanines présentes dans les fruits et les légumes. « Même si j’en sais beaucoup sur les aliments fonctionnels, » dit-il, « mes connaissances sont encore très limitées. »
Les anthocyanines appartiennent à un groupe de composés appelés flavonoïdes qui donnent la couleur au tissu des aliments. Comme groupe, les flavonoïdes neutralisent les composés qui pourraient autrement détruire des cellules et l’ADN. M. Mazza décrit les anthocyanines comme « les bons qui barrent la route aux méchants » afin de prévenir des problèmes de santé chroniques comme la maladie cardiovasculaire et divers types de cancer.
« Si nous consommons au moins cinq portions de fruits et de légumes chaque jour, nous avons de fortes chances de réduire le risque de développer ces maladies chroniques, » affirme-t-il.
Mais bon nombre de personnes sont loin de consommer ce minimum, ajoute-t-il. Beaucoup de consommateurs n’ont probablement pas le temps de préparer des repas équilibrés tandis que d’autres ne sont pas conscients des avantages.
Même si les aliments fonctionnels et les nutraceutiques seront de plus en plus offerts en formats pratiques et transformés, les consommateurs continueront d’apprécier la convivialité d’un bon repas. Aussi, quelle que soit la façon dont les aliments fonctionnels sont consommés, il y aura un marché en croissance pour les fruits et les légumes qui affichent ces composants biologiquement actifs, indique M. Mazza.
Des débouchés pour les agriculteurs
Conscients du potentiel qu’offrent les projets de valeur ajoutée portant sur les aliments fonctionnels et les nutraceutiques, quinze agriculteurs de la région d’Ottawa ont créé le Eastern Ontario Identity Preserved Farmers Consortium.
Après avoir consulté des entreprises de la région engagées dans les sciences de la vie et évalué leur rôle dans la production, la fabrication et la commercialisation de composants biologiquement actifs, les producteurs signeront leurs premiers contrats de production ce printemps.
« Ils agissent comme sous-traitants pour fournir des molécules de grande valeur, » explique Randal Goodfellow, de Goodfellow Agricola Consultants Inc., qui conseille le groupe. « Ils seront partenaires avec d’autres dans la chaîne de la découverte, de la fabrication et de la commercialisation. Ceux qui peuvent gérer ces cultures à forte valeur et saisir les occasions en profiteront. »
La liste des composés biologiquement actifs et uniques présents dans les aliments fonctionnels ne cesse de s’allonger et cela représente une possibilité énorme pour les agriculteurs, souligne M. Don Murray, professeur en science de l’alimentation et semi-retraité de l’Université de Guelph dans le sud-ouest de l’Ontario.
Mais ils devront accepter de sortir des sentiers battus et être prêts à creuser pour trouver l’information et les ressources, ajoute-t-il.
« Il y a déjà beaucoup d’information sur les aliments fonctionnels, » poursuit M. Murray. « Le défi consiste à cerner le marché et à établir les contacts commerciaux et techniques nécessaires de sorte que les agriculteurs puissent les produire et les commercialiser. Il ne faut plus penser en termes de cellules pleines de blé ou de silos remplis de maïs. Les vrais débouchés se trouvent à des échelles beaucoup plus petites et devraient être très attrayants du point de vue économique. »
Aliments fonctionnels : sources et bienfaits potentiels pour la santé |
Tel que défini par Santé Canada, un aliment fonctionnel est semblable en apparence aux aliments conventionnels, il fait partie de l’alimentation normale et il procure des bienfaits physiologiques démontrés et(ou) réduit le risque de maladie chronique au-delà des fonctions nutritionnelles de base
Un nutraceutique est un produit isolé ou purifié à partir d’aliments et est généralement vendu sous des formes médicinales qui ne sont pas généralement associées à des aliments et il s’est avéré avoir un effet physiologique bénéfique ou assurer une protection contre les maladies chroniques.
Voici une liste partielle des composés biologiquement actifs, de leurs sources et de leurs bienfaits potentiels.
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Composant actif |
Source |
Effets physiologiques |
Béta-glucanes |
Orge et avoine |
Stimulent le système immunitaire ; agissent sur les niveaux de cholestérol |
Caroténoïdes |
Fruits et légumes |
Réduisent le risque de certains cancers |
Catéchines |
Thé |
Réduisent le risque de certains cancers |
Acides gras essentiels |
Oléagineux |
Réduisent le risque de maladie cardiaque et de coagulation sanguine ; agissent sur les niveaux de cholestérol ; réduisent l’inconfort de l’inflammation due à l’arthrite rhumatoïde |
Fibres |
Blé et pois |
Réduisent le risque de cancer du colon et de maladie cardiaque |
Flavonoïdes et isoflavones |
Légumes, fruits et soya |
Réduisent le risque de certains cancers |
Glucosinolates |
Brocoli |
Réduisent le risque de certains cancers |
Gluten |
Blé |
Agit sur les niveaux de cholestérol |
Lactoferrine |
Lait |
Favorise les bactéries intestinales et régule le transport et l’absorption du fer |
Lignanes |
Lin |
Réduisent le risque de certains cancers et soulagent les symptômes de la ménopause |
Lycopène |
Tomates |
Réduit le risque de certains cancers, de maladie cardiaque et de diabète |
Phytoestrogènes |
Lin |
Réduisent le risque de cancer du sein |
Probiotiques |
Lait fermenté |
Réduisent le risque de maladie intestinale |
Resvératrol |
Vin rouge |
Réduit le risque de maladie cardiaque |
Protéines de lactosérum |
Lait |
Stimulent le système immunitaire ; agissent sur les niveaux de cholestérol |
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