Quand fermiers et chefs cuisiniers travaillent ensemble
Grâce à la nouvelle passion pour les
produits locaux, certains producteurs
canadiens voient leur nom sur les menus
les plus sélects du Canada.
Sur pied, l’agneau canadien se vend environ 1 $ la livre. Dans les
assiettes de certains grands restaurants canadiens, une simple
portion peut faire grimper l’addition à plus de 30 $.
Le chemin qu’un producteur primaire doit parcourir pour voir son
nom sur les menus d’un restaurant est long et ardu, mais de plus
en plus de producteurs se lancent avec succès dans cette aventure.
Depuis 2003, Lynette Kreddig, une productrice d’agneaux de
Mayerthorpe (Alberta) fournit de l’agneau à de grands restaurants,
du La Ronde au Château Lacombe, à Edmonton, en passant par
le prestigieux Banff Springs Hotel. L’agneau qu’elle élève figure
sur les menus de Jasmin Kobajica, chef du restaurant La Ronde,
qui mettent à l’honneur les produits locaux.
Pour acquérir et fidéliser un client aussi prestigieux, Mme Kreddig
a dû adapter son mode d’exploitation aux goûts culinaires, à la
demande des consommateurs et aux réalités économiques
impitoyables de la restauration.
« Le plus important est de s’engager à livrer le produit quand on
le demande, explique-t-elle, et de toujours fournir un produit
d’une qualité irréprochable. »
La bonne race. Après diverses recherches et avoir essayé différentes
races de moutons pendant plusieurs années, Mme Kreddig a porté
son choix sur le mouton de race Katahdin. Le chef Kobajica apprécie
la saveur douce de cette race et Mme Kreddig trouve que cet animal
de taille moyenne, très fertile, produisant une viande maigre, est idéal.
La bonne production. La plupart des éleveurs produisent des
agneaux une fois par an, en hiver, mais les restaurants demandent
un approvisionnement constant, toute l’année si possible.
Mme Kreddig a organisé son programme de reproduction de manière
à produire des agneaux trois fois par an – approximativement en
janvier, avril et juin –, et son programme d’alimentation de manière
à avoir des agneaux prêts pour le marché presque toute l’année.
« Il faut s’arranger pour qu’ils n’arrivent pas tous à maturité en
même temps », dit-elle.
Le bon prix. Pour réaliser des profits, les restaurants ont besoin
de prix stables. « Les cuisiniers ne peuvent pas travailler avec des
prix qui fluctuent constamment, souligne-t-elle. Ils ont besoin
d’un prix fixé d’avance pour établir leurs menus tous les six mois,
et ne pas être obligés de les changer. Je suis payée à l’agneau et
mon prix reste le même toute l’année. »
La bonne distribution. Mme Kreddig élève les agneaux et le chef
Kobajica les prépare dans sa cuisine. Mais ni l’un ni l’autre ne
s’occupe des étapes intermédiaires. C’est la société Full Course
Strategies d’Edmonton qui est l’intermédiaire essentiel entre la
productrice et le restaurant, et qui s’occupe de la préparation et
de la distribution. La société est un lien vital, qui transmet les
demandes des restaurateurs aux producteurs, et aide les cuisiniers
à trouver les meilleurs produits que les fermes de la région
peuvent offrir.
Vouloir le meilleur prix pour un produit est une chose ; voir le
nom de votre ferme sur un menu de restaurant en est une autre.
Avant de passer de productrice anonyme à célébrité sur un menu,
Mme Kreddig a profondément réfléchi à tout ce que cela représentait.
Cinq années plus tard, elle ne regrette rien.
« Cela change certaines choses quand les gens connaissent la
provenance de ce qu’ils mangent, dit-elle. Je dois veiller à ce que
tout ce que je mets sur le marché soit d’une qualité irréprochable.
C’est une responsabilité énorme. »
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