Une pincée de ceci et un soupçon de cela…
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Pour les gestionnaires agricoles qui souhaitent se diversifier, les herbes et les épices peuvent constituer de bons débouchés.
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Pour certains Canadiens, l’assaisonnement de la volaille ne serait pas le même sans un soupçon de sarriette. En fait, indique Pat Ryan, il s’agit de l’herbe culinaire favorite de ses compatriotes de Terre-Neuve lorsque vient le temps de préparer du poulet ou de la dinde.
La sarriette est aussi un des principaux responsables des résultats de M. Ryan, qui possède une exploitation de 75 acres près de Belle River à l’Île-du-Prince-Édouard où il cultive cette herbe culinaire depuis le début des années 1980.
Selon les ventes de l’année précédente et le volume de ses stocks de report, M. Ryan ensemence entre quatre et huit acres par an. Le rendement du matériel végétal peut atteindre 8 000 livres par acre, soit 800 livres une fois déshydraté. M. Ryan procède également au nettoyage et au conditionnement de son produit afin d’ajouter de la valeur aux ventes qu’il réalise directement auprès du consommateur soit par l’Internet ( http://www.peisland.com/summer/savory.htm ) soit par l’entremise d’un vendeur à temps partiel.
Contrairement au revenu qu’il tire de ses cultures légumières, vendues tôt après la récolte, les ventes de sarriette s’étalent sur toute l’année et représentent environ 20 % de son revenu agricole brut. L’herbe est vendue en sachets de tailles variées; ainsi, le prix de vente suggéré par le fabricant pour un paquet de 454 grammes (une livre) est de 16 $.
M. Ryan aimerait accroître ses superficies de sarriette, mais la commercialisation exigerait alors du temps et de l’argent qu’il n’a pas. C’est pourquoi il a adopté la stratégie des petits pas – l’exploration d’un nouveau canal de distribution, par exemple – pour veiller à ce que son offre ne dépasse pas trop la demande. « Il faudrait un engagement presque à temps plein pour mettre en marché une récolte plus importante, » dit-il. « Pour l’instant, nous pouvons ajouter de la valeur à ce que nous cultivons et offrir un très bon produit. »
Ils se sont joints au club
Les herbes culinaires appartiennent à un secteur en pleine croissance qui comprend les épices, les huiles essentielles, les suppléments à base d’herbes et les herbes médicinales.
Certains producteurs de la Saskatchewan ont joint les rangs du club des producteurs d’herbes et d’épices il y a dix ans. Leurs superficies de coriandre et de carvi ont augmenté régulièrement au cours des années 1990. En 1998, la récolte combinée a été d’environ 9 250 tonnes sur une superficie de près de 32 000 acres.
Le segment qui croît le plus rapidement est celui des herbes médicinales. En 1998, la valeur des ventes au détail était estimée à quatre milliards de dollars aux États-Unis, souligne Jack Moes, directeur de The Great AgVenture, société de communication et de consultation dans le domaine agricole établie à Brandon au Manitoba. À l’échelle mondiale, on estime que les ventes d’herbes médicinales dépassent les dix milliards de dollars annuellement.
Le Canada est un petit joueur dans le marché mondial des herbes et des épices, mais des enquêtes et des études de faisabilité menées récemment dans certaines provinces – dont un rapport manitobain pour lequel M. Moes a été consultant – font ressortir l’intérêt grandissant des producteurs pour ces possibilités de diversification.
L’accent mis sur la santé personnelle, l’acceptation de plus en plus large dans les communautés scientifiques et médicales de même que le marché des aliments « naturels » et des produits médicinaux alimentent la demande en Amérique du Nord, explique M. Moes.
« Le fait de voir ces produits sur les rayons des supermarchés est une indication de l’intérêt significatif que leur porte le grand public, » souligne-t-il.
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De la C.-B. à l’Î.-P.-É., les herbes et les épices se révèlent des
options de diversification rentables pour les gestionnaires agricoles. La bonne culture
au bon moment peut se traduire par des bénéfices énormes.
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Les herbes sont rentables
Mais la demande des consommateurs peut être une cible mouvante, prévient Tracy Schimpf.
« Certains producteurs ont gagné des revenus incroyables, » indique Mme Schimpf, ancienne administratrice de la B.C. Herb Growers Association et rédactrice actuelle du bulletin d’information de l’organisme. « Mais il y a aussi eu beaucoup de déception chez des producteurs "en herbe" arrivés trop tard.»
Tracy et son mari, Warren, cultivent une variété d’herbes sur une superficie de tout juste 1-1/2 acre près de Kelowna. « Notre exploitation n’est pas très grande, » dit-elle, « mais elle permet de payer l’hypothèque. »
Si les mauvaises herbes, les maladies et les insectes sont des problèmes courants en agriculture, ce sont les articles des médias qui peuvent avoir les effets les plus perturbateurs sur ce genre de culture.
« Chaque fois qu’une herbe médicinale fait la manchette, nous savons ce qui va se passer, » raconte-t-elle en pensant aux superficies ensemencées qui souvent catapultent l’offre au-delà de la demande. L’échinacée pourpre (dont la consommation améliore le système immunitaire) se vendait 25 $ la livre au milieu des années 1990, rappelle Mme Schimpf. Les superficies actuelles ont fait baisser les prix jusqu’à 1 $ la livre.
Par contre, les possibilités sont encore énormes pour ceux qui cultivent le bon produit au bon moment. Par exemple, le rendement de l’hydraste du Canada (une plante racine à croissance très lente utilisée elle aussi pour améliorer le système immunitaire) peut osciller entre 500 et 3 000 livres à l’acre de produit déshydraté et commercialisable. L’hydraste certifié biologique peut se vendre jusqu’à 75 $ la livre.
« L’offre d’hydraste cultivé est si limitée que la récolte des peuplements sauvages menace son existence même, » affirme Mme Schimpf. « Ceux qui ont ensemencé de l’hydraste il y a quelques années ont probablement fait beaucoup d’argent. »
À la recherche de solutions de rechange
Les herbes et les épices à valeur élevée suscitent beaucoup d’intérêt chez les producteurs de tabac du sud de l’Ontario qui cherchent des cultures de rechange en raison du mouvement antitabac.
« Certains producteurs s’inquiètent de leur gagne-pain et de leur mode de vie, et ils sont en quête de solutions, » indique Mike Columbus, spécialiste en développement des cultures nouvelles au ministère ontarien de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Affaires rurales à Simcoe.
La valeur des terres à tabac étant de 4 000 $ l’acre et celle de la location au comptant se situant entre 150 $ et 250 $ l’acre, la production d’herbes et d’épices pourrait être une solution à fort rapport économique pour remplacer la culture du tabac, souligne-t-il.
Les producteurs évaluent des possibilités comme celles des herbes médicinales (la valeur actuelle à la ferme de la production d’herbes médicinales est de 100 millions de dollars). Parmi les autres options, il y a le cilantro et le stevia (300 fois plus sucré que le sucre), les fruits (petite poire, kiwi et baie de sureau), le houblon et les productions légumières spéciales comme les mini-carottes.
M. Columbus conseille à quiconque envisage de se lancer dans la production d’herbes et d’épices de se diversifier quelque peu tout en maintenant le nombre de cultures à un niveau traitable.
« Vous ne voudrez pas vous limiter à une ou deux cultures et voir de pleines remorques en provenance du New Jersey venir saturer votre propre marché, » dit-il. « En même temps, il se peut que l’on cultive trop de variétés. Le mieux est de se concentrer sur, disons, une demi-douzaine de produits. »
Les gestionnaires agricoles intéressés à obtenir plus de renseignements sur la production des herbes et des épices devraient encercler la période du 18 au 23 juillet sur leur calendrier. C’est à ce moment-là que se tiendront Herbs 2000 et Herbfest 2000, un rassemblement international de producteurs, de transformateurs, de détaillants et de chercheurs à Saskatoon et à Outlook en Saskatchewan. Pour plus de détails, visitez le site Web de la conférence à l’adresse www.saskherbspice.org/herbfest2000 ou contactez les organisateurs par télécopieur au (306) 694-2182 ou au (306) 727-2226.
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